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Philippe Seguin: Homme d'Etat.

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Philippe Seguin - 1943/2010
Philippe Seguin - 1943/2010

Philippe Séguin : le chantre de l’Europe des peuples et de la souveraineté éclairée

Il est des voix qui transcendent les époques, des visions qui éclairent les méandres d’un avenir incertain. Celle de Philippe Séguin, homme d’État d’une rare densité intellectuelle et morale, résonne aujourd’hui avec une force singulière. Lui qui, face aux illusions de Maastricht, avait osé dénoncer l’impasse d’une Europe construite sans ses peuples, nous laisse un héritage précieux, à la croisée de l’exigence démocratique et de la raison historique.


Philippe Séguin portait en lui un sens aigu de l’État, ce cadre essentiel de la souveraineté et du bien commun. Pour lui, la France n’était pas qu’un territoire ou une simple entité administrative, mais une idée, un projet incarnant l’ambition collective de ses citoyens. Dans ses discours, il ne cédait ni aux modes intellectuelles ni aux dogmes technocratiques, préférant la profondeur de l’analyse à la superficialité des slogans.

Son patriotisme n’avait rien de nostalgique ou de belliqueux : il était un appel à la responsabilité.


Pour Séguin, aimer la France, c’était la penser forte, lucide, et ouverte au monde, sans jamais renier ses fondements. Ce patriotisme raisonné le conduisait à une critique exigeante de la construction européenne, qu’il voyait comme une dérive technocratique, déconnectée des réalités populaires et des aspirations nationales.

Une critique prophétique de l’Europe technocratique


En 1992, face à la ferveur quasi religieuse qui entourait le traité de Maastricht, Philippe Séguin fut l’une des rares voix à s’élever pour dénoncer les dangers d’une Europe qui, au lieu de se construire avec les peuples, se bâtissait en leur nom, mais sans leur consentement véritable. Ses mots, alors jugés excessifs, résonnent aujourd’hui comme des prophéties :


« La construction européenne se fait sans les peuples, elle se fait en catimini, dans le secret des cabinets, dans la pénombre des commissions, dans le clair-obscur des cours de justice. »


Il voyait dans cette méthode une trahison démocratique, où une élite d’experts et de fonctionnaires imposait des décisions majeures sans jamais solliciter un véritable mandat populaire :


« Voilà 35 ans que toute une oligarchie d’experts, de juges, de fonctionnaires, de gouvernants prend, au nom des peuples, sans en avoir reçu mandat, des décisions dont une formidable conspiration du silence dissimule les enjeux et minimise les conséquences. »


Cette critique s’accompagnait d’une mise en garde contre la soumission aux dogmes et au conformisme intellectuel. Séguin dénonçait une époque où toute remise en question de la vision fédéraliste de l’Europe était immédiatement disqualifiée :


« Qui veut se démarquer du culte fédéral est aussitôt tenu par les faiseurs d’opinion (...) pour un nostalgique ou un primaire, au pire pour un nationaliste forcené. »


Une vision lucide des rapports de force en Europe


Philippe Séguin n’était pas un adversaire de l’idée européenne. Bien au contraire, il voyait dans l’union des nations européennes une nécessité face aux bouleversements du monde. Mais il refusait une Europe fondée sur le déni des réalités historiques et géopolitiques.


« Il ne servira à rien de tenter de ficeler l’Allemagne. Car l’Allemagne, et c’est bien naturel dans sa position et avec les moyens dont elle dispose, ne renoncera à sa souveraineté que si elle domine l’ensemble, certainement pas si elle lui est subordonnée. »


Face à une Allemagne en position dominante, Séguin appelait la France à se ressaisir et à retrouver son rôle de contrepoids :


« Ce que la France peut apporter de plus précieux à l’Europe, c’est de trouver en elle-même assez d’énergie et de volonté pour devenir un contrepoids, pour équilibrer les forces en présence, pour peser lourd face à l’Allemagne. »


Dans un monde où les États-Unis se recentrent sur le Pacifique, abandonnant l’Europe à ses propres incertitudes, et où des puissances rivales – qu’elles soient étatiques ou religieuses – testent chaque jour les fragilités de l’Europe, les avertissements de Philippe Séguin prennent une résonance dramatique.


L’Europe, soumise aux logiques transactionnelles de ses alliés et aux pressions économiques et stratégiques de ses adversaires, semble incapable de faire face. La Commission actuelle, paralysée par la faiblesse de sa gouvernance et l’absence de vision, fait pâle figure face aux idéaux des pères fondateurs.


Séguin avait raison : une Europe fondée sur la souveraineté de ses nations, construite dans la clarté et la transparence, et animée par la volonté des peuples, aurait été plus forte face aux défis d’aujourd’hui. Une Europe où la défense, la souveraineté industrielle et stratégique, et la préservation des identités nationales ne seraient pas des compromis mais des fondements.


Reconstruire l’Europe ou trahir son idéal


Il est encore temps de réformer. Temps de refonder une Union européenne qui soit fidèle à ses promesses originelles, qui repose sur la transparence, le consentement populaire et la souveraineté partagée. Une Europe qui s’affirme face à ses alliés autant que face à ses ennemis, et qui ne cède ni à l’impuissance ni à la résignation.


Sans cette réforme profonde, les bases posées par Philippe Séguin et les idéaux des pères fondateurs resteront lettres mortes. Ces hommes, qui rêvaient d’une Europe forte et libre, doivent se retourner dans leurs tombes devant l’incurie actuelle. Mais leur rêve n’est pas perdu : il appartient encore aux peuples de le reprendre, et de bâtir une Europe qui soit enfin digne de son histoire et de son avenir.


Version anglaise: There are voices that transcend time, visions that illuminate the complexities of an uncertain future. Philippe Séguin, a statesman of rare intellectual and moral depth, is one such voice. Confronting the illusions of Maastricht, he dared to denounce the dead end of a Europe built without its peoples, leaving behind a legacy at the crossroads of democratic integrity and historical reason.


Séguin possessed a profound sense of the state—an essential framework for sovereignty and the common good. For him, France was not merely a territory or an administrative entity; it was an idea, a project embodying the collective ambition of its citizens. In his speeches, he shunned intellectual trends and technocratic dogmas, favoring depth of analysis over superficial slogans.


His patriotism was neither nostalgic nor belligerent; it was a call to responsibility.

To Séguin, loving France meant envisioning it as strong, clear-sighted, and open to the world, without ever renouncing its foundations. This thoughtful patriotism led him to a rigorous critique of European integration, which he perceived as a technocratic drift, disconnected from popular realities and national aspirations.


A Prophetic Critique of Technocratic Europe


In 1992, amid the almost religious fervor surrounding the Maastricht Treaty, Philippe Séguin stood as one of the few voices to denounce the dangers of a Europe built not with its peoples but in their name, without genuine consent. His words, dismissed at the time as excessive, now ring prophetic:


"European construction is being carried out without the peoples, in secrecy, behind the closed doors of cabinets, in the shadows of commissions, and the twilight of courts."


He saw in this method a betrayal of democracy, where an elite of experts and officials imposed major decisions without securing true popular mandates:


"For 35 years, an oligarchy of experts, judges, civil servants, and leaders has been making decisions in the name of the peoples without a mandate, hidden by a formidable conspiracy of silence that conceals the stakes and minimizes the consequences."


Séguin warned against submission to dogmas and intellectual conformism, decrying an era where any challenge to the federalist vision of Europe was summarily dismissed:


"Anyone who dares to question the federalist cult is immediately branded by opinion-makers as nostalgic or simplistic, at worst a rabid nationalist."


A Clear-eyed Vision of Europe’s Balance of Power


Philippe Séguin was not an opponent of the European idea. On the contrary, he regarded the union of European nations as essential in the face of global upheavals. Yet, he rejected a Europe founded on a denial of historical and geopolitical realities.

"It will be futile to attempt to bind Germany. For Germany, naturally given its position and means, will not relinquish its sovereignty unless it dominates the whole, certainly not if it is subordinated to it."


Faced with Germany’s dominant position, Séguin urged France to regain its role as a counterbalance:


"The most valuable contribution France can make to Europe is to find within itself enough energy and will to become a counterweight, to balance the forces at play, to stand strong against Germany."


In a world where the United States pivots toward the Pacific, leaving Europe to its uncertainties, and rival powers—state and non-state alike—test the continent’s fragilities, Séguin’s warnings take on a dramatic resonance.


Today’s Europe, subjected to transactional logics from its allies and economic and strategic pressures from its adversaries, appears ill-prepared to face these challenges. The current Commission, paralyzed by weak governance and a lack of vision, pales in comparison to the ideals of its founding fathers.


Séguin was right: a Europe rooted in the sovereignty of its nations, built with transparency and driven by the will of its peoples, would be far stronger in addressing today’s challenges. A Europe where defense, industrial and strategic sovereignty, and the preservation of national identities are not compromises but foundations.


Rebuilding Europe or Betraying Its Ideal


There is still time to reform. Time to rebuild a European Union that honors its original promises—founded on transparency, popular consent, and shared sovereignty. A Europe that asserts itself before its allies as much as before its adversaries, refusing both impotence and resignation.


Without this profound reform, the principles articulated by Philippe Séguin and the ideals of the founding fathers will remain unfulfilled. These men, who dreamed of a strong and free Europe, would turn in their graves at today’s shortcomings. Yet their dream is not lost: it remains for the peoples of Europe to reclaim it and to build a Europe worthy of its history and its future.

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